Voilà bien longtemps qu’on ne s’était pas dégourdi les jambes sérieusement chez Archipel, alors nous avons décidé de donner un petit coup de pouce à nos amis de Lombok qui eux aussi souffrent du manque d’activité. Nous avons donc choisi de gravir le Mont Rinjani, culmine à 3726 mètres d’altitude le troisième plus haut volcan d’Indonésie, et de partager avec vous cette merveilleuse ascension.
La grimpette démarre du village de Sembalun, à trois heures de route de l’aéroport de Mataram. Nous y passerons donc la nuit afin d’attaquer tranquillement le lendemain matin.
Apres les formalités d’enregistrement au centre administratif du parc national, a 1156, dans la plaine agricole et maraîchère de Sembalun, nous grimpons à l’arrière d’un pick-up pour rejoindre le point de départ, dit POS 1, à 1300 mètres d’altitude environ. Déjà le monstre nous domine.
La marche débute aux environs de 9 heures.
Excellente surprise pour ceux qui souhaiteraient s’économiser ou que la vue du massif qui nous domine épuise déjà, il est possible de rejoindre le POS 2 à 1,4 km et 1500 m d’altitude… en moto.
Le chemin vers le POS 2 s’élève en souplesse à travers une forêt tropicale, puis ondule gentiment le long des flancs du volcan couverts de hautes herbes et de fougères, en une savane paisible. On franchit des canyons, une mise en jambe agréable dans ce que nous pourrions appeler des alpages. Nos amies les vaches nous regardent passer impassibles, comme toujours. Présence de fougères arborescentes, mes plantes favorites…
Du POS 2 au POS 3, 1.7 km nous mènerons à 1800m. On y trouve deux petit toko, des magasins, ou une famille d’éleveurs propose des boissons et des biscuits, du thé, du café, des sucreries, et bien sûr, des cigarettes.
A mesure que l’on s’élève, apparaissent de grands conifères.
Du POS 3 au POS 4 commence une progression volcanique plus classique, à savoir tout droit le long d’un pli de terrain…
Le bord du cratère est visible maintenant, il a l’air proche mais bien haut, avec ses 2639 mètres. La montée est franche, beaucoup plus raide que ce que l’on a gravi précédemment, mais tombe bien sous les jambes. Quelques endroits glissants et très abrupts, mais rien de bien méchant.
Dans toute l’Indonésie, aux alentours des volcans, vers 11 heures, les nuages s’élèvent des vallées pour aller s’accrocher aux sommets. Le Rinjani n’échappe pas à la règle, et peu à peu, alors que la matinée s’égrène, nous progressons dans les nimbes.
Les grands résineux sont toujours présents, parfois plus denses.
Le rebord du cratère consiste en une arête sableuse d’une dizaine de mètre de large, arrondie, et exposée aux vents et au soleil quand il y en a, selon l’heure..
Peu d’ombre hormis sous quelques grands arbres, pas vraiment d’endroits pour se reposer. Il est conseillé de dérouler son matelas de sol et de s’allonger en guise de repos.
Lorsqu’ils nous rejoignent, les porteurs montent les tentes et installent la cuisine de campagne, et nous régalent de thé, café, biscuits, et de bananes frites, en attendant le souper.
La vue, lorsqu’elle se dégage, est superbe sur le lac Segara, et l’on aperçoit déjà l’Anak Segara,le petit cône actif du Rinjani. Il s’en échappe de discrètes mais toxiques fumerolles. Le géant n’est qu’endormi, et il ronfle.
Vers 17H, les nuages s’évaporent, le ciel se purifie enfin, et l’on peut alors admirer le sommet et le lac en toute quiétude.
Le coucher de soleil sur les falaises face à nous est majestueux.
En contrebas, si proche semble-t-il, le campement du lendemain se distingue.
Par-dessus les tentes, et pas si proche en revanche, le sommet nous observe. L’arête sommitale se détache comme un rasoir, et l’épaule arrondie qui marquera la première étape demain semble elle aussi facilement accessible.
Nous en reparlerons.
Apres un excellent repas de riz, poulet, tofu et tempe, nous allons tous nous coucher sans tarder en prévision du lever très tôt le lendemain !
L’épaule, l’arête sommitale et le point culminant
Lever aux aurores destiné on l’aura compris à arriver si possible au sommet avant les nuages et surtout pour le lever du soleil.
D’après nos calculs et les indications accessibles, nous allons devoir parcourir 2.2 kilomètres et gravir 1100 mètre de D+. Une paille.
La première difficulté consiste à rejoindre l’ »épaule « , une butte très raide et glissante qui conduit à l’arête sommitale. Des passages mixtes de terre abrupte, de sable et de rochers en marches hautes, une mise en bouche à aborder lentement pour s’échauffer.
Arrêt pour souffler à ce que l’on appelle ici la « lettre L », qui marque le départ de la grande transversale qui longe l’arête, et qui s’étend sur plus ou moins 1 kilomètre. La montée est alors régulière, toujours dans le sable et les cailloux, mais sans grande difficulté.
Nous arriverons ensuite au repère dit « lettre A », qui marque le départ de la dernière étape : une montée brutale, vicieusement raide (Je dirais 40%), d’environ 500 mètres. Pour ceux qui n’ont jamais fait la trace dans 50 centimètres de poudreuses en pleine pente, voilà une douloureuse introduction. Un pas en avant, deux pas en arrière. Les bâtons de marches sont indispensables.
L’arrivée au sommet se fait après une légère redescente, dernier clin d’œil du maîtredes lieux pour nous rappeler l’humilité.
Arrivé bien avant tous mes camarades et de nuit, j’ai eu le loisir de dormir deux heures avant le lever du soleil. Ambiance méditative, très humide et froide malgré l’absence de vent.
Lorsque le jour se lève, on prend alors conscience de la majesté des lieux : Un premier cratère s’ouvre à l’Est, rocailleux au possible, derrière lequel se dessine au loin le Gunung Tambora, une autre légende volcanique indonésienne, sur l’ile de Sumbawa.
Vers l’Ouest, en croissant de lune, le lac Segara, quelque 1700 m plus bas, occupe le fond du cratère principal, ou nous camperons ce soir.
On distingue au lointain, triangle ferme et isocèle, notre Mont Agung Balinais national.
Ce spectacle gigantesque se trouble à peine de l’arrivée au compte-goutte des différents marcheurs.
Apres les photos d’usage, la redescente sans difficulté se fait (pour ma part) au pas de charge, car j’adore dévaler les pierriers. Je soulève sur mon passage des nuages de poussières, mille excuses pour ceux qui grimpent encore, mais c’est le privilège des plus rapides, désolé.
A 7h00, le soleil tape déjà dur, il fait chaud, je plains les marcheurs qui montent.
Bien faire attention de maîtriser son énergie cependant, car le plus dur reste à faire : la descente dans le cratère pour rejoindre le lac.
Depuis le cratère, le site de camping est nettement visible, et il semble tout proche. Grossière illusion. Il faudra 3 bonnes heures aux plus rapides pour l’atteindre, via une désescalade de rocailles, de grosses marches glissantes, de caillasse ou l’on met les mains les fesses très souvent. Certains passages sont très exposés. Les plus mauvais sont équipés de mauvaises cordes et de de rambardes métalliques aux scellements suspects. Pas le droit à l’erreur, alors aborder la chose lentement, en souplesse. Terrain très cassant pour les genoux et les articulations, surtout en fin de journée.
Le pire étant que nous avons longé les flancs du cratère en déviant vers la vallée et qu’il faut… remonter ! Jamais très drôle, mais bon.
Pour les plus lents du groupe, arrivée avec 18 heures de marche depuis le réveil !
En cas de pluie, allumer un cierge et se munir d’un parachute.
Nous progresserons dans la brume (Les nuages se sont levés, vous vous rappelez ? ), l’ambiance est mystérieuse. L’installation sur les berges du lac, et la collation servie par Maitre Ahmad, notre cuisinier et porteur chef, est la bienvenue.
L’emplacement du camping se trouve sous les arbres. La vue sur le volcan intérieur est saisissante.
A quelques centaines de mètres du campement, (une petite descente), des sources d’eaux chaudes permettront une toilette réparatrice.
Les indonésiens s’adonnent immédiatement à un de leur passe-temps favoris : la pêche !
Nous en mangerons d’ailleurs les fruits. Le coucher du soleil sur les parois rocheuses en face de nous est encore plus spectaculaire que d’en haut la veille…
Du sommet, je m’étais dit que je monterais sur l’Anak Segara, et bien non. Et d’une je suis trop fatigué, soyons honnête, et de deux, il n’y a pas de chemin, ce serait une première, je la garde pour une autre fois ! Et il faudrait au moins une journée de progression aventureuse et sans filet !
Dîner et coucher tôt, une fois de plus. L’humidité des nuages et du lac tombe en quelques instant, tout est trempé, rien ne sèche, il faudra attendre le soleil du lendemain !
Départ matinal comme toujours, après un petit déjeuner sympathique et de nouvelles sessions de photos et de pêche pour les plus enragés.
Nous allons donc redescendre par la mène au village de Torean. Depuis le tremblement de terre de 2018, la configuration du volcan à complètement changé. Les pentes du volcan sont beaucoup plus craquelées et soumise à une intense érosion, ce qui ne facilite pas la stabilité des sentiers.
La route traditionnelle du trek, une boucle partant de Sembalun et finissant a Semeru, a du être revue, la dernière partie étant moins fréquentée car peu stable. Bonne nouvelle cependant, il n’est plus nécessaire de remonter le cratère comme auparavant.
Nous descendrons donc en suivant la rivière qui naît au point bas du cratère, issue du lac, en suivant les flancs de cette vallée encaissée.
Il faut compter la journée à un pas tranquille. Le terrain est cassant, la descente est raide, parfois engagée, comme précédemment.
Nous cheminerons donc un moment dans le lit de la rivière, avant de remonter parfois de beaucoup, pour atteindre des points de ravitaillement en eau bienvenus, avec vue sur de belles cascades en contrebas.
Retour de la savane, puis cheminement glissant et boueux dans une belle forêt tropicale primaire.
L’aventure se termine dans les champs de maïs, de café et de cacao du village de Torean.
Raccourci possible en moto pour les plus fatiguées, afin de s’épargner les deux derniers kilomètres, parfois bétonnés, qui mènent du village aux jardins en hauteur.
Surprise, les prix des motos sont fixes, avec cependant un supplément tarif de nuit. Belle organisation messieurs.
Au village, restauration possible et boissons glacées en mangeant un Bakso, des boulettes de viandes aux nouilles, très réparatrices.
Le village de Torean vient de s’ouvrir au tourisme, il est donc brut de toute infrastructure digne de ce nom. Couchage rustique possible.
A noter combien ces villages du Nord Lombok ont été affectés par le tremblement de terre. Tout est encore en chantier.
Le minaret de la mosquée, miraculeusement intact contrairement au reste de la structure, est à lui seul un exemple du bon gout architectural de cette partie du globe. A ne pas manquer.
Mention spéciale a nos amis les porteurs pour leur travail titanesque, leurs efforts, leur cuisine et leur gentillesse sans égale. Sans eux, rien ne serait possible!
Car ce sont eux qui nous approvisionnent en eau, en mets fins, mais qui aussi dressent le camp, le démontent, nettoient…
Ils peuvent aussi porter vos sac en plus de leur charge, si vous êtes fatigués, moyennant un petit quelque chose que je vous prie de le croire, ils n’ont pas volé…
Une ascension plus longue que difficile, (quoi que), à ne pas prendre à la légère et réservée aux marcheurs avertis et entraînés.
Prévoir des vêtements chauds et imperméables (Il peut pleuvoir), mais aussi du léger, des bâtons de marche impérativement, un nécessaire de premiers bobos pour les ampoules, des barres énergisantes et snacks en quantité suffisante.
L’altitude élevée peut occasionner des troubles dangereux pour la santé, à ne pas prendre à la légère. Les guides sont équipés en oxygène si besoin…
Un dernier mot : remmenez vos déchets, tous vos déchets !!
Nos guides et porteurs sont tous formes aux normes de sécurité, et grâce a notre logistique impeccable, vous pourrez profiter de chaque instant en toute tranquillité.
Nos ascensions sont à la carte, donc vous ne serez qu’entre vous, et pas en groupe!